Paroisse Notre-Dame-de-Grâce

Ce site est consacré à la paroisse Notre-Dame-de-Grâce,
qui a été créée en 1924 et
réintégrée à la paroisse-mère Saint-Sauveur en 1997,
dans la ville de Québec.




EXPOSITION PERMANENTE





Messages les plus récents

Pour lire les messages les plus récents, TOUJOURS VOIR APRÈS LA SECTION "Hommage à Simonne Tardif (Dumont)".

Table des matières

Pour atteindre la table des matières, veuillez cliquer ICI puis voir après la section "Hommage à Simonne Tardif (Dumont)".

Historique de NDG en résumé

Pour se rendre à l'historique succinct de NDG, veuillez cliquer ICI puis voir après la section "Hommage à Simonne Tardif (Dumont)".

Précisions

Les prêts qui me furent faits de nombreux documents me décidèrent à partager ces souvenirs avec la collectivité. Vos commentaires, souvenirs et suggestions sont les bienvenus, de même que vos corrections des erreurs ou omissions involontaires.

Notes :

Nous respectons le désir des individus de ne pas voir leur nom ou leur photo apparaître.

Pour lire les messages, toujours descendre après le "Hommage à Simonne Tardif (Dumont)".

La présentation est optimale en fonction de Windows XP, avec Firefox (Mozilla) comme navigateur et lorsque les fenêtres sont ouvertes à pleine largeur. À défaut de ces conditions, on risque de rencontrer des irrégularités.

On peut cliquer sur les photos pour les agrandir.

Les messages sont sujets à des mises à jour, sans autre avis.

Michel Gignac

Horaire de l'Exposition

À VISITER au
CENTRE COMMUNAUTAIRE ÉDOUARD-LAVERGNE,
390 Arago Ouest :

EXPOSITION permanente pour rappeler
la paroisse Notre-Dame-de-Grâce,
son curé fondateur et son église.

Elle peut être visitée surtout
le VENDREDI entre 9h et 21h,
le SAMEDI entre 9h et 15h,
(fermée le dimanche)

Pour ces jours et pour les AUTRES JOURS,
prière de s'entendre avec un préposé
(418-691-7190 ou 418-641-6252).

ENTRÉE GRATUITE

N.B. Liens vers les messages concernant l'Exposition :
inauguration
photos
crédits

Simonne Dumont (Tardif) 1920-2018

Simonne Dumont (Tardif) 1920-2018

Hommage à Simonne Tardif (Dumont), co-fondatrice du blogue et qui a écrit ce texte :

ÉLOGE DE L'ÉGLISE

Les cloches ont sonné pour la dernière fois dimanche le 29 juin 1997. Les portes de l'église Notre-Dame de Grâce dans Saint-Sauveur se sont fermées à jamais après une dernière messe solennelle dans l'église que remplissaient des résidents et d'anciens paroissiens heureux d'y revenir mais tristes de la voir fermer. La générosité de ces derniers avait permis de la conserver plusieurs années, permettant à la paroisse de célébrer son 70e anniversaire en 1994. Mais la baisse d'assistance aux offices avait fait diminuer les revenus, causant finalement la fermeture.

Depuis, des organismes ont essayé en vain de faire revivre ce temple merveilleux. Mais pendant ces années, la bâtisse s'est détériorée, ce qui fait que le Journal "Le Soleil" annonçait le 15 octobre 2008 : "L'église sera démolie d'ici Noël" pour faire place à des logements. Que de serrements de coeur pour ceux et celles qui y sont attachés !

Nous perdons donc définitivement notre belle église. Le curé-fondateur Édouard Lavergne en 1924 (voir photo), s'il voit son église débâtie, va certainement être très triste comme nous, les paroissiens. C'était un immeuble d'une grande qualité acoustique, classé édifice à "valeur patrimoniale élevée" par déclaration gouvernementale. Le glas a sonné mais je sais que toutes les personnes qui ont fréquenté ce temple en garderont de bons souvenirs.

L'église est maintenant démolie et, pour rappeler l'histoire de la paroisse, ce site "NDGquébec" se plaît à évoquer certains événements et certains aspects de la vie à NDG, à l'aide de photos, d'extraits de "La Bonne Nouvelle", le journal de la paroisse à ses débuts, etc. Les curés et vicaires dévoués, les constructeurs, les marguilliers, les bénévoles ne seront pas oubliés.

Simonne Dumont.
(Photo de l'église prise le jour de la fermeture.)

lundi 30 août 2010

Les spécialistes scientifiques de l'École Supérieure

Un lecteur avait exprimé le souhait que les noms des professeur-e-s du Collège NDG soient suivis de la matière qu'ils/elles enseignaient. C'est une suggestion intéressante, surtout pour le niveau de l'École Supérieure puisque, dans les listes des enseignants déjà élaborées, il n'y a que les disciplines scientifiques pour lequelles la spécialité n'était pas indiquée.

À l'occasion de la rentrée des classes, voici l'énumération des noms des spécialistes pour les différents domaines, dans les années disponibles déjà traitées, à quelques ans près.

Sciences, en général :
Frère Léo (entre autres 1943-44)
Frère Hubert (entre autres 1947-48)
Frère Lucien (Paul-Émile Cormier) (entre autres 1947-48)
Frère Liguori (Paul Duchesne)(entre autres 1949-52)
Frère Gervais 1952-53
Frère Charles (Liboire Weaner) 1953-56
Léo Pelletier 1956-61
Pierre Mercier 1962-64
Charles-Édouard Pageau 1960-61
Léon Landry 1961-62
Monsieur C. Bernier 1961-62
Robert Blais 1961-63
Léon Ouellet 1963-64

Mathématiques :
John-J. Hodgson 1952-57
Maurice Mercier 1957-62

Biologie :
Rolland Dumais 1957-58 et et 1961-63

À venir, les titulaires de l'École Supérieure de Notre-Dame-de-Grâce (niveau secondaire).



Michel.
(pour consulter les listes plus complètes des enseignant-e-s du Couvent et du Collège, voir la table des matières)

jeudi 26 août 2010

Fin d'été 1927 : nouvelles sur les vacances

Le journal "La Bonne Nouvelle" de la fin des vacances de 1927 résumait les activités de l'été.

Le Patro Laval.

Environ 80 garçons ont fréquenté le Patronage Laval pendant les vacances. "Ces chiffres sont éloquents et assez encourageants pour nous engager à faire la même chose pour ces petits l'an prochain. Mais, il y a toujours un mais, quand on songe qu'il y a plus de 700 enfants dans la paroisse, on regrette qu'un plus grand nombre n'ait pas profité de ces avantages. La négligence des parents y est pour beaucoup."

Pique-nique à Notre-Dame-des-Bois.

Le 23 août, une centaine de fillettes partaient aux cris de sirènes retentissantes, pour Notre-Dame-des-Bois, sur le chemin du Lac Beauport. "Sous la conduite de l'abbé Ferland et de quelques religieuses, elles ont passé d'agréables instants. Le directeur de cette maison leur fit une courte allocution remplie de fine poésie et d'à propos." On joua à la balle, au ballon à main, on alla à la chasse aux fruits; il y eut des courses de toutes sortes. "Pour le retour la pluie s'en est mêlé; mais ce fut l'occasion de faire une petite veillée à la canadienne. Les chants avec" chorus" furent en honneur; elles sont si bien nos bonnes chansons canadiennes! "Le petit navire" y alla du sien, "Marie Anne s'en va-t-au moulin" fit sa part et l'"Alouette" eut sa ronde, le tout entrecoupé de bombes éclatantes: zimm! boum! ah! On dit que ces chères petites seraient disposées à faire de ces promenades toutes les semaines."

Deux jours plus tard, c'était le tour d'une centaine de petits gars à exécuter à peu près le même programme. "Ils se sont amusés aussi de tout coeur. Les champions au "football", au "baseball" et tout ce qui finit par "ball" n'ont pas manqué de chanter leurs "épaulettes". Les fervents du bain s'en sont donnés à la nage. Enfin ils sont revenus enchantés, dit-on."

Pèlerinage à Notre-Dame-des-Victoires

Dans la 1ère semaine d'août, nos cadets et quelques enfants de la Maîtrise ont fait encore leur pèlerinage à Notre-Dame-des-Victoires sous la direction de l'abbé Ferland. "Dans leur beau costume aux couleurs de Marie, ils ont défilé par les rues de la ville au pas quasi-militaire, bannières en tête et petites caisses battant la marche. Le retour du sanctuaire de Notre-Dame s'est effectué par les rues de la haute ville en passant par la Terrasse." Arrivés près de notre église un bienfaiteur, qu'ils connaissent bien, paya à tous ceux qui n'étaient pas fatigués (naturellement personne n'était fatigué) de la crème à la glace.

Le Comité paroissial en pique-nique

Le troisième dimanche de juillet, le Comité Paroissial accepta la gracieuse invitation de Francis Boudreault, directeur du Cercle dramatique, et se rendit en pique-nique à sa maison de campagne à ValCartier.

Restaurant Notre-Dame

Roméo Demers venait d'ouvrir un restaurant au coin des rues Arago et de Mazenod, voisin des barbiers Lucien Morin et Charles Fortier. "Il vendra des liqueurs douces, des crèmes glacées, des médecines brevetées. À la suite du magasin, il y a une jolie petite salle, où l'on peut se faire servir des consommations."Michel.
(La photo du Patro Laval provient de l'historique de l'organisme rédigé par Gilles Bureau.)

lundi 16 août 2010

Le premier ministre Taschereau réagit au sermon du Curé Lavergne

La biographe du Curé Lavergne, Maude Routier, avait inclus dans son document une lettre du premier ministre du Québec, Louis-Alexandre Taschereau (photo), en réaction au sermon du religieux publié ici il y a deux semaines. Le Curé Lavergne avait, dans un texte souvent titré "Votez comme des hommes libres", analysé des enjeux de l'élection qui allait se tenir quelques jours plus tard. Voici cette lettre :





"CABINET DU PREMIER MINISTRE
PROVINCE DE QUÉBEC
UNIVERSITÉ 257 No 16
Confidentielle
Québec
le 21 novembre 1935

Monseigneur Camille Roy, P.A.,
Recteur de l'Université Laval
Québec.

Monseigneur,

Monsieur l'abbé Lavergne, curé de Notre-Dame-de-Grâce, a fait un sermon dans son église, le 17 novembre courant. Ce sermon a été imprimé et est distribué aujourd'hui avec profusion dans la ville.

Je lis, dans ce sermon, le paragraphe suivant:
"Enfin, hier encore, le Chef du Régime lui-même signifiait par téléphone au Recteur de l'Université que cette institution en porterait les conséquences si tel prêtre ne supprimait pas la conférence qu'il doit prononcer à la radio, cette après-midi pour l'Heure Catholique."
Et il ajoute:
"Il est impossible de donner des noms, mais les faits sont réels.
"Voilà, mes frères, des faits et des considérations suffisantes à attirer vos réflexions, voilà des méthodes de chantages, un système d'oppression dont la conscience publique souffre contre lesquels elle se révolte."
Vous me permettrez d'exprimer toute ma surprise que, la conversation très confidentielle et, je crois, très amicale j'ai eue avec vous par téléphone, soit ainsi parvenue à l'abbé Lavergne. Celui-ci dit qu'il ne mentionne pas de noms, mais lorsqu'il parle du Chef du Régime et du Recteur de l'Université, je crois que vous et moi sommes suffisamment désignés.

J'ai un souvenir très distinct et très net de la conversation que j'ai eue avec vous.

Quelqu'un, très près de l'Archevêché, m'a informé que monsieur l'abbé Castonguay devait, dimanche dernier, à la radio, faire une charge contre nous, et les paroles à peu prês textuelles dont je me suis servi sont les suivantes: "On m'informe que M. l'abbé Castonguay, prêtre du Séminaire et professeur de philosophie, doit faire une charge contre nous". Sur ce, vous m'avez répondu que vous n'aviez pas de contrôle sur l'Heure Catholique. Mais je vous ai dit que M. l'abbé Castonguay était un de vos prêtres et que je croyais qu'il serait mieux pour vous de voir son texte, car il était préférable de vous en avertir, afin que ce discours ne fut fait qu'aprês vu qu'il pourrait en résulter un incident désagréable.

Vous m'avez promis d'y voir.

Je ne sais si notre conversation a été rapportée à M. l'abbé Lavergne, tel que je viens de le dire, ou si celui-ci a puisé sur son imagination!

Mais je crois que vous me rendrez le témoignage que, ni directement, ni indirectement, je n'ai fait de menaces, ni ai employé de méthodes de chantage, comme le dit M. l'abbé Lavergne.

Je pense que les relations du gouvernement, avec l'Université, dans le passé, ont été telles - et c'est comme cela que je veux les garder - que j'étais autorisé confidentiellement à vous faire part de l'avertissement que l'on m'avait donné.

Je crois que j'ai droit, de votre part, à une déclaration que l'incident est tel que je le rapporte et que vous n'avez reçu, de ma part, ni menaces, non plus que j'aie employé aucune méthode de chantage.

Veuillez agréer, Monseigneur, l'expression de mes hommages respectueux.

signé: L.A. Taschereau."


Maude Routier ajoutait: Mgr Roy (photo) lui répond positivement et communique une déclaration à trois journaux de Québec. À la suite de cet incident, le curé Lavergne reçoit des avertissements du clergé à l'effet de cesser de s'afficher ainsi sur la scène politique.

Michel.

mardi 10 août 2010

Sermon d'adieu du Curé Lavergne (lu par un vicaire)

Dans le même esprit que la publication du sermon du Curé Lavergne concernant l'élection, voici maintenant celle de son sermon d'adieu qui avait été prononcé en son absence par le vicaire Gérard Gosselin. Il a été obtenu grâce à la famille de Moïse Fradet qui avait conservé le document original et que nous remercions.


MES ADIEUX


AUX PAROISSIENS DE N.-D. DE GRÂCE
--- 19 octobre 1941 ---
ÉDOUARD-V. LAVERGNE, ptre
Curé du 1er novembre 1924 au 12 octobre 1941.

Mes Frères,

Je croyais pouvoir monter une dernière fois en cette chaire où vous m'avez vu si souvent, mais je ne m'en sens pas la force. L'émotion intense qui étreint mon cœur à la pensée de vous annoncer ma démission me laisse craindre que ma voix ne soit couverte par les larmes, et l'éteignent avant que j'aie fini de parler.

Aussi ai-je prié Monsieur l'abbé Gosselin de vous lire ces quelques lignes que je vous écris. .Je veux être court, parce que je n’ai pas le droit de prendre pour moi les minutes précieuses dont a besoin le prédicateur de la retraite pour vous en recommander les importants exercices.

La chose n'est pas pour vous complètement nouvelle: c'était dans l 'air depuis déjà quelques mois. Son éminence dont c'est le droit, pour des raisons dont elle reste le juge, m'a ordonné de lui remettre ma démission. Je n'avais qu'à obéir, convaincu que je ne pourrais faire de bien parmi vous contre la volonté de mes supérieurs. Cet acte prendra effet le jour que le Cardinal fixera.

Ainsi seront rompus les liens surnaturels qui me rattachaient à vos âmes et me rendaient responsables, au tribunal de Dieu, des plus humbles, des plus pauvres comme des autres.

Vous le comprendrez, mes frères, cette séparation ne peut avoir lieu sans une déchirure du cœur très douloureuse. Il est vrai qu'elle libère ma conscience, mais elle n 'en creuse pas moins dans mon cœur une blessure qui sera lente à guérir. On ne vit pas dix-sept ans avec une population comme la vôtre sans s'y attacher par des liens puissants qui descendent jusqu'au plus intime de l'âme. J'ai été mêlé à vos peines, j'ai vu la misère d'un très grand nombre, et j'ai souffert de ne pouvoir pas lui apporter des remèdes autant qu'il aurait été nécessaire et que je l 'aurais voulu. .Je vous ai donné mon dévouement, mon coeur et tout mon argent. Je pars du milieu d'entre-vous, n'emportant même pas ce que j'avais en y arrivant. Mais, je bénis le Bon Dieu
d'avoir pu parfois soulager quelques misères. Souvent j'y ai trouvé mes plus grandes consolations.

Le chagrin très vif que je ressens à la pensée de vous quitter et de ne plus vous adresser la parole ici, chaque Dimanche, je l'offre au Sacré-Cœur de Jésus pour que sa grâce ouvre au repentir les âmes des pécheurs et vous accorde à tous une grande augmentation d'amour de Dieu.

De même, mes frères, je vous prie, ceux qui pourraient éprouver quelques peines de ce départ, de ne pas perdre votre mérite en récriminations stériles. Si votre chagrin est réel, donnez-lui une valeur surnaturelle en l'offrant à Dieu pour le succès de nos retraites paroissiales qui commencent ce matin.

C'est par la voix des supérieurs que Dieu nous manifeste ses volontés. Quand l'autorité a parlé, il n'y a qu'à s'incliner comme si Dieu lui-même avait parlé. Rien n'arrive sans sa permission et tout ce qui arrive est pour notre bien, même si cela ne nous paraît pas ainsi, même si cela nous fait souffrir.

Depuis dix-sept ans j'ai beaucoup prêché dans cette chaire. Rappelez-vous que, à l'exemple de S. Paul, "je n'ai pas jugé bon de rien savoir parmi vous que Jésus-Christ et Jésus-Christ crucifié", dont le monde d'aujourd'hui ne veut plus.
"Et, mon langage et ma prédication n'ont pas consisté en
"discours persuasifs de sagesse humaine, mais en démonstration
"d'esprit et de puissance, afin que votre foi ne soit pas fondée
"sur une sagesse d 'homme, mais sur la puissance et la sagesse
"de Dieu." – (I Cor. 2-2).
À cause de cela, on a souvent trouvé mes paroles sévères, la doctrine austère même exagérée, cependant, je ne crois pas avoir dépassé ni même atteint la pensée de l'Évangile et l'enseignement des saints.

En tout et toujours, j'ai ardement voulu le bien de vos âmes et la gloire de Dieu qui doit être notre occupation principale.

Au cours de ces dix-sept années, à cause de mes défauts, il m'est certainement arrivé pour une raison ou pour une autre d'en contrister un grand nombre d’entre-vous. Je vous prie de croire que cela a toujours été involontaire. Ceux auxquels j'ai fait de la peine je les prie de me pardonner avec la même générosité que le Sacré-Cœur mettra à leur pardonner leurs fautes durant les jours de miséricorde de la retraite.


Pour ma part, je n'ai rien à pardonner à qui que ce soit. Car, si j'ai eu des chagrins, je ne connais personne de ceux qui me les ont causés et je ne veux pas en connaître.

Pendant ces jours de retraite nous prierons ensemble pour que le Bon Dieu vous envoie un pasteur selon son cœur qui puisse vous faire le bien dont je n'ai pas été capable. Quand il viendra, recevez-le comme l'envoyé de Dieu et sans vain retour sur le passé, sans comparaison avec qui que ce soit, donnez-lui votre confiance entière.

Enfin un dernier mot pour remercier les bons vicaires qui durant mon absence forcée m'ont remplacé avec un zèle qu'il m'a été agréable d'entendre louer et que je prie Dieu de récompenser.

Je veux aussi remercier nos marguilliers avec lesquels il y a toujours eu entente et collaboration, les membres si dévoués de notre comité d'Action Catholique, nos admirables conférences Saint-Vincent de Paul, d'hommes, de jeunes gens et de demoiselles, nos Enfants de Marie qui chaque Dimanche vont à domicile chercher la "Part de Dieu", notre Garde Ste-Jeanne-d'Arc si dévouée à tous les services d'ordre, et en général tous ceux qui d'une façon ou de l'autre ont travaillé aux œuvres de la paroisse.

Je remercie tant de bonnes familles dont l'inlassable générosité a permis la construction, l'entretien de cet édifice, le progrès et la vie spirituelle de cette paroisse. Sans elles qu'aurions-nous pu faire ?

Et. les autres que je n'ai pu conquérir, prions la Vierge Marie que le nouveau curé les attire au Cœur de Jésus.

Et mon dernier mot sera maintenant la parole du "Pater":
"Que votre volonté soit faite Seigneur sur la terre comme au ciel."
Quel sera notre bonheur si nous passons le reste de nos jours et si nous finissons notre vie en faisant la volonté de Dieu!

Prions tous les uns pour les autres afin que, vivant plus de Foi, nous sachions nous nourrir de renoncements comme on se nourrit de pain,
Ainsi soit-il.

(signé : ) Édouard-V. Lavergne Ptre


(La photo est celle du curé Lavergne en compagnie de Jean-Baptiste Fradet. Son frère jumeau Alexandre et lui étaient les chauffeurs du Curé.)

Michel.

mardi 3 août 2010

Sermon du curé Lavergne concernant l'élection de 1935 (COMPLET)

Après un essai infructueux auprès de la Bibliothèque Nationale du Québec, qui semble avoir perdu le texte du sermon du curé Lavergne concernant l'élection de 1935, je remercie Maude Routier qui avait inclus ce discours dans son essai biographique de 1998 "Édouard-Valmore Lavergne". Le texte complet du sermon peut donc être publié ici et il remplace un message précédent qui avait reproduit une version incomplète du discours :

J'ai reçu quelques demandes afin de publier le sermon du curé Édouard Lavergne prononcé à l'église Notre-Dame-de-Grâce, à la veille de l'élection provinciale de 1935. Il semble que ce soit un discours célèbre et révélateur de l'époque. La date était le 17 novembre 1935, huit jours avant le scrutin qui devait décider du sort du gouvernement de Louis-Alexandre Taschereau. Le curé Lavergne disait, comme sermon en l'église Notre-Dame-de-Grâce :

"Mes frères,

Je vous ai promis dimanche dernier que je vous dirais aujourd'hui comment voter. Je vais tenir ma parole. Il y a parmi vous des émissaires du Sanhédrin qui viennent comme les Pharisiens allaient vers Notre-Seigneur pour me surprendre dans mes paroles. Ne vous fatiguez pas avec vos crayons et vos calepins. Si vous en voulez, je vous fournirai moi-même des copies de ce que je vais dire. Ce que je n'ai pas peur de dire ici dans la chaire de vérité, près du Tabernacle où réside Jésus, la vérité et la vie, il ne m'en coûte nullement de le mettre par écrit sous ma signature. Ce n'est pas ma coutume d'avoir peur de dire ce que je crois mon devoir de dire, quelques conséquences ennuyeuses il puisse m'en arriver. Mes paroissiens le savent. Les étrangers puisque vous êtes venus, nombreux vous allez l'apprendre.

Ce que je vais dire, je le lis. C'est écrit.

Comment voter ?

Si vous me suivez bien avec un esprit sincère et libre, vous comprendrez et je n'aurai pas besoin d'ajouter :

Pour qui voter ?


Votez comme des hommes libres.

D'abord je vous demande de voter comme des hommes libres et non pas comme des esclaves à la chaîne qui suivent sans savoir où on les mène. Inconscients, abrutis, ils s'en vont traînant leurs chaînes sans chercher le moyen de s'en libérer.

C'est à ce degré d'abêtissement, de soumission animale que l'esprit de parti a réduit un trop grand nombre d'électeurs catholiques, Canadiens-Français, et auquel il voudrait abaisser tous les autres.

"L'esprit de parti, déclare son Éminence le Cardinal Villeneuve, n'est autre qu'une passion et un affaiblissement de l'esprit." Aussi, n'est-il jamais permis de penser, d'agir ni de voter consciemment sous son influence exclusive.

Or, c'est à cet esprit de parti aveugle, stupide et souvent coupable que vous appellent depuis des semaines des orateurs à gage, des journaux qui comme "Le Soleil" coûtent à la Province 500 mille piastres par année et "L'Événement" quelque chose comme 20 mille piastres. Ces journaux sont payés pour vous tromper au bénéfice de leurs maîtres et ils n'y manquent pas.

Ils mentent.

Ils vous bernent.

Ils se moquent de vous sans relâche avec une impudence que votre apathie à les remettre en place rend audacieuse.

Ils sont l'un des mille moyens employés pour vous entretenir dans l'esprit de parti pour vous attacher à cette sottise, à ce péché de voter sous l'influence exclusive de l'esprit de parti. Car à cette besogne tout leur sert. Ils en retirent tant de profits.

Et parce que, en ces dernières semaines, justement effrayés des malheurs économiques qui nous accablent et menacent de s'aggraver, des hommes venus des deux partis ont rompu leurs liens et, librement face au public, se sont donné la main pour lutter ensemble et libérer la Province des chaînes que lui font porter les puissances d'argent accoquinées dans de multiples directorats avec les puissances politiques rouges, l'esprit de parti crie à la trahison. Et sous sa férule tous ses esclaves, à partir des modestes employés jusqu'aux substituts du Procureur Général, hurlent en choeur.

À les entendre, il faudrait croire que trahir son Dieu et son pays, c'est bagatelle, que le grand crime, le crime unique, impardonnable, c'est abandonner le parti, pour mieux servir Dieu et la Patrie; il faudrait presque croire que, pour rester fidèle à l'esprit de parti, il est ordonné de manquer à tous ses devoirs envers Dieu et la Patrie.

Depuis longtemps pour ancrer profondément cette idée dans vos esprits, jusqu'au fond de vos âmes ils ont tout employé.

Que dis-je ?

C'est pour cela qu'"ils" ont imposé silence à vos prêtres. "Ils" vous ont laissé croire que notre sacerdoce nous enlevait nos droits de citoyens, qu'il tuait en nous le coeur du patriote et que, devant les entreprises qui menacent notre vie nationale, économique et religieuse, nous n'avions pas d'autre chose à faire que de nous renfermer dans le silence de nos sacristies.

"Ils" ont voulu nous empêcher de vous dire ce qu'il aurait fallu dire dans le passé pour que cet esprit de parti ne vous domine pas, et "ils" voudraient que nous ne disions pas ce qu'il faut dire aujourd'hui pour le tuer. Sachant, selon la parole de Jésus-Christ, que la "Vérité vous rendra libre", "ils" ont organisé le régime des octrois pour y enfouir notre parole. Ainsi vos chefs, d'ordinaire et dans l'ensemble, les plus désintéressés, les mieux en mesure de vous éclairer, "ils" ont tâché de leur imposer silence.

Un journal anglais et protestant le signalait, l'autre jour, en ces termes :
"Le clergé compose la classe la plus intelligente, la plus honnête et la moins préjugée de la population. Ses fonctions le mettent plus que tout autre groupe en mesure de constater les ruines et les souffrances semées par l'exploitation. Sa culture intellectuelle et son esprit de discernement ne lui laissent aucun doute sur les vrais causes du désarroi dans lequel se débat la classe pauvre. Nous n'avons pas à juger les motifs qui dictent son silence en matière d'intérêt public. Mais nous regrettons sincèrement cette situation et nous condamnons les efforts faits par des puissances extérieures pour maintenir à tout prix, par menace même, la consigne du silence. Que l'avocat sorte de son bureau, le notaire de son étude, l'agriculteur des ses granges, l'instituteur de sa classe et qu'ils s'occupent de la chose publique - oui, mais "le prêtre à la sacristie!" Il pourrait faire trop de mal aux puissances de l'argent. Qu'il prêche aux exploités la résignation et, aux exploiteurs sourds, qu'il rappelle la justice... et encore qu'il surveille ses termes ! Sinon..."
Qui a dit cela?... Un prêtre?...

Non... c'est "Le Moniteur" ("The Instructor" en anglais) dont le Dr. W.L. Goodwin est le rédacteur en chef, et M. L. Even, assistant-rédacteur.

Combien en est-il, mes frères, parmi vous qui ont crié chaque fois que j'ai essayé d'éclairer certains problèmes nationaux ou ouvriers, à la lumière des enseignements de l'Église : "Mais qu'il se mêle donc de ses affaires!"

Vous les entendrez bientôt sur le perron redire le même cri qui ne règle rien, et ne peut détruire la vérité de mon enseignement. Où ont-ils pris la connaissance de ce qui est de mes affaires et de ce qui ne l'est pas?

Qui le leur a enseigné?

Toujours le même stupide esprit de parti qui leur refuse le droit d'écouter, de se renseigner et même de réfléchir... mais les fanatise, les crétinise.

"Ils ne veulent pas que le Pape dise:
"Qu'aucun membre du clergé ne s'imagine que pareille action est étrangère au ministère sacerdotal sous prétexte qu'elle s'exerce sur le terrain économique; car c'est précisément sur ce terrain que le salut des âmes est en péril."
Combien de fois j'ai parlé avec cette pénible conviction que mes paroles n'apporteraient pas la lumière à ces pauvres aveugles et n'auraient pas d'autres résultats que de libérer ma conscience en me coûtant peut-être des amitiés précieuses, en m'attirant des ennuis considérables!

Mes frères, si nous avez quelque fierté humaine, si vous voulez voter comme des hommes libres, mettez de côté les chaînes et les bandeaux que le parti impose à vos volontés et à vos intelligences.

Prenez la peine d'user de votre jugement que vous aurez renseigné à bonnes sources non pas aux fontaines empoisonnées de l'esprit, comme "Le Soleil" et "L'Événement" et certains discours d'avocat zélé à payer les chaînes dont le Maître les a chargés.

Un homme intelligent doit s'informer des motifs qui commandent son action et celle des autres. Un homme libre ne se détermine pas à agir par passion, mais par un acte de volonté que son intelligence a éclairée, qu'elle détermine et qu'elle guide dans le développement de l'action, jusqu'au but à atteindre. Aujourd'hui, il y a pour agir avec intelligence et liberté des raisons non seulement de fierté humaine, mais d'ordre patriotique.

C'est pourquoi j'ajoute:


Votez en patriotes.

De grâce, laissez donc dormir en paix dans leurs tombes les mânes de Laurier, de Mercier et des autres. Les temps sont changés et ont apporté des devoirs différents que ceux auxquels ils ont soumis leur conscience. Si vous voulez prendre exemple sur eux, que ce ne soit pas pour vous porter à l'aide des répugnants fantoches couverts de leurs manteaux, mais pour vous inspirer des motifs nobles, désintéressés, patriotiques qui ont pu les animer.

De grâce, laissez aussi de côté les élections fédérales. Il ne s'agit pas ici du Gouvernement d'Ottawa dont le compte est réglé, mais du régime qui nous écrase à Québec dont il faut régler le compte.

Comme le remarquait très justement "L'Action Catholique" d'hier soir, il n'y a pas ici de questions de langue, ni de relations impériales, ni d'armement, ni de part d'influence.

Toute la controverse est sur le terrain économique et il ne faut pas permettre qu'on l'en sorte.

Il ne s'agit pas de savoir si les bleus ou les rouges vont l'emporter, mais si nous allons continuer à subir le joug matérialiste des puissances de l'argent.

Il s'agit de savoir si la Province de Québec va continuer à se priver et à priver ses vieillards des bienfaits de la pension de vieillesse auxquelles s'opposent des compagnies d'assurance dont est directeur un chef du Gouvernement.

Il s'agit de savoir si notre race va continuer à végéter dans la pauvreté, parce que le régime profite des trusts qui nous pressurent et nous volent au bas mot un milliard par année.

Il s'agit de décider, par des élections honnêtes, si le chantage et toutes les formes et tous les procédés de la corruption électorale vont rester dans nos moeurs, vont continuer à souiller et à déshonorer notre vie nationale, et à pousser notre bon peuple hors de la voie que le Bon Dieu lui a tracée pour atteindre la haute mission de ses destinées providentielles.

Le régime étale avec une orgueilleuse complaisance la liste de ses octrois aux institutions religieuses, collèges, hospices, hôpitaux.

Soit! Mais il ne devrait pas ignorer que ce sont là des services qui relèvent des gouvernements au point de vue financier et, plutôt que de leur jeter sans cesse à la face les sommes qui ne paient pas le tiers de ce que coûtent ces services, il devrait remercier les religieux et religieuses dont le dévouement surnaturel soulage le budget de ces charges dispendieuses.

En second lieu, ces octrois, mais c'est vous, c'est tout le monde, ce sont les taxes innombrables, dont nous sommes chargés, qui les paient. Et depuis 5 ans notre dette publique a monté de cinquante millions. Avec l'argent des autres il est facile d'être généreux mais il n'y a pas de quoi à tant se vanter et à parodier les paroles saintes pour crier: "Nos adversaires ont la Foi, nous avons les oeuvres."

Enfin il est bon que vous sachiez ceci. Ces fameux octrois sont une arme trop souvent utilisée pour essayer de faire chanter les communautés qui en bénéficient.

Dans une institution que je ne puis nommer, mais je sais ce dont je parle, on a forcé les supérieurs à se priver d'un excellent professeur parce qu'il n'était pas à genoux devant le régime.

Dans un collège les supérieurs ont refusé de laisser signer par leurs élèves les engagements de la Ligue de Moralité Publique de crainte que cela déplaise au régime et nuise aux octrois.

Dans une autre maison on a menacé de refuser certains avantages pour l'organisation médicale si les supérieurs ne congédiaient pas l'un des meilleurs chirurgiens ou si lui-même ne se taisait pas.

Enfin, hier encore, le Chef du Régime lui-même signifiait par téléphone au Recteur de l'Université Laval que cette institution en porterait les conséquences si tel prêtre ne supprimait pas la conférence qu'il doit prononcer à la radio, cet après-midi pour l'Heure Catholique. Il est impossible de donner des noms, mais les faits sont réels.

Voilà, mes frères, des faits et des considérations suffisantes à attirer vos réflexions, voilà des méthodes de chantage, un système d'oppression dont la conscience publique souffre, contre lesquels elle se révolte.

C'est pourquoi je vous dis, votez lundi non seulement en homme libre, conscient de sa dignité, non seulement en patriote qui veut le bien de sa race, l'honneur et la postérité de son pays, mais votez en bons chrétiens.


Votez en bons chrétiens.

Nos retraites paroissiales viennent de finir. On y a éloquemment rappelé les obligations de votre baptême. On vous a dit et démontré que dans tous ses actes le chrétien doit se rappeler qu'il est fils adoptif de Dieu, qu'il doit chercher et vouloir la gloire de son Père, que là est le but principal de sa vie et de son élévation surnaturelle.
Son Éminence Benoît XV (photo) écrivait: «c'est sur le terrain économique que le salut des âmes est en péril.»

Or tout le terrain économique s'effondre, nos populations s'y enfoncent dans une misère et une oisiveté sordides. Après 1931, nous avions espéré que, revenu au pouvoir, le régime allait entreprendre quelque chose pour sortir de leur oisiveté forcée dans laquelle croupissent nos hommes et nos jeunes gens, mais il n'a rien fait que de maintenir les trusts et d'assurer leurs développements.

Ne sentez-vous pas que toutes ces masses étreintes par la misère, travaillées par le désespoir, glissent rapidement vers le communisme qui gagne dans les profondeurs sociales? Ne sentez-vous pas qu'en cette occurrence les âmes courent sur le terrain économique le très grave danger de se perdre?

Nous tous qui sommes membres au corps mystique de Jésus-Christ, frères par la Foi plus encore que par le sang, nous n'avons pas le droit de rester indifférents à ces détresses matérielles d'où naissent les détresses morales, le péril des âmes.

Les pères de famille surtout devraient voter non pas en pensant au parti qu'ils ont peut-être trop fidèlement et trop aveuglément suivi dans le passé, mais à l'avenir temporel et spiritue1 de leurs jeunes gens. Ne vous laissez pas distraire, je vous en prie, de cette question principale par des intérêts secondaires, mesquins, égoïstes, par des préoccupations de vengeance personnelle à satisfaire contre tel ou tel candidat, par l'appât de quelques piastres, même moins, peut-être, à ramasser dans le bourbier électoral rouge comme prix de votre vote.

Regardez plus haut!

Dans la présente lutte, il saute aux yeux que l'avenir de nos jeunes est en jeu. Ils en ont la secrète intuition. Et nous qui disparaîtrons bientôt nous devons en tenir compte.

Il y a présentement dans notre Province 90,000 jeunes gens qui ne travaillent pas. L'an prochain à la sortie des écoles et des collèges, si rien ne change, leur nombre dépassera les cent mille.

Or, depuis six ans que dure cette désastreuse crise provoquée par les manigances des financiers véreux et des grosses compagnies, voulez-vous me dire ce que l'on a fait pour nos jeunes gens?

Au mois de mai dernier, après une enquête menée au milieu de notre jeunesse de Québec seulement, en face des constatations humiliantes et douloureuses qu'elle révéla, le Cercle Caseault de L'Université Laval organisa une assemblée dans les salles de l'Université. Le Ministre du travail y fut invité. On lui présenta les résultats de cette enquête. Nous voulions savoir ce que lui et son Gouvernement entendaient faire pour venir en aide à notre jeunesse pour ouvrir un avenir moins sombre à ces forçats de l'oisiveté.

Le Ministre ne nous a rien dit. Il a récité des banalités.

Son Gouvernement n'a rien fait.

Et la société plus ou moins responsable de cet état de choses a continué à se désintéresser du malheureux sort de notre jeunesse. Elle l'a abandonnée à elle-même, aux crochets des parents, aux tentations de la voirie. Et lorsque ces malheureux jeunes gens, aux prises avec la misère, succombaient à quelques tentations de vols, la société s'occupait de les loger, de les vêtir, de les nourrir et de les corriger à coups de fouet dans les prisons de l'État.

Des centaines de jeunes gens croupissent dans nos prisons pour le vol de quelques paquets de cigarettes, tandis que les magnats des trusts, condamnés par trois tribunaux, se remboursent à même le public de leurs frais et amendes. Ils continuent de nous voler... et le régime n'a pas renoncé à les protéger.

Des petits laitiers sont poursuivis vingt-quatre fois pour avoir vendu le lait pendant vingt-quatre jours consécutifs quelques sous meilleur marché que le prix fixé par le trust, mais les maîtres des trusts pour avoir volé le public n'ont pas d'autre châtiment que la liberté... de continuer. Leurs directeurs ne siègent-ils pas aux conseils des mêmes sociétés que les administrateurs de la justice?

Voilà, mes frères, des situations anormales qui doivent cesser, des crimes contre vous et vos enfants que vous avez le devoir de châtier, de faire cesser.

Songez-vous à ce qu'ils deviennent au point de vue religieux!

Un jésuite le Père Dugré a écrit ces trop justes paroles:
"Si l'amour ne trouve pas son aboutissement national dans la création d'un foyer, il a bien des chances de tourner à l'immoralité sous toutes ses formes, tant chez la jeune fil1e que chez le jeune homme; et ainsi ce qui aurait dû être, selon les desseins de Dieu, une force et une beauté devient, par la négligence des hommes, une déchéance, une laideur, un déshonneur."
Or, qui niera que présentement, à cause de leur oisiveté forcée, à cause de leurs salaires de famine, un nombre toujours plus grand de jeunes gens sont presque acculés à cet état d'avilissement?

Qui niera qu'un très grand nombre n'y soient pas déjà descendus?

Si nous ne voulons pas que le mal s'aggrave, qu'il s'étende sur deux générations et devienne presque totalement irréparable, il est grand temps que lundi nous donnions des votes libres, des votes de patriotes, des votes de chrétiens: la dignité humaine, l'avenir de nos jeunes gens, notre conscience le réclament.

Si vous m'avez suivi et compris, je n'ai pas besoin d'insister pour vous exhorter à exercer votre droit de suffrage, comme le demande Son Éminence le Cardinal Villeneuve, et vous savez à qui le donner.

Ai-je besoin maintenant de vous mettre en garde "contre la honteuse corruption électorale et la vénalité des votes qui se pratiquent au mépris des règles fondamentales de la conscience" que notre Cardinal a dénoncés dans sa lettre sur le devoir électoral qui a fait le tour du pays?

Ai-je besoin de vous rappeler 1a sainteté du serment, l'outrage très grave que le parjure fait à Dieu?

Ai-je besoin de vous dénoncer l'usage des liqueurs alcooliques par lesquelles les cabaleurs achèvent le travail d'abrutissement commencé par des journaux comme "Le Soleil", "L'Événement" et "La Bataille", qui se disputent la palme de la canaillerie?

Ai-je besoin de flétrir cette organisation d'apaches, qu'on appelle les "télégraphes" et qui votent à la place des morts et des absents en usurpant leurs noms; c'est ça que l'on appelle la machine électorale du régime?

Ces crimes, la loi civile autant que la loi morale les condamnent. Il y a lieu d'espérer que, cette année, ceux qui seront pris recevront le châtiment prévu par la loi.

Vous n'avez pas oublié les orgies électorales qui ont obligé le Gouvernement à voter le Bill Dillon pour légitimer sur le parquet de l'Assemblée Législative la présence des voleurs d'élection, et absoudre par un texte de loi de la corruption la plus odieuse et des vols les plus effrontés. Tout cela est opposé à la morale chrétienne et recevra son châtiment si la conscience publique est encore capable de réactions.


Je termine.

J'ai cru de mon devoir de vous dire ces choses. Il ne me paraît pas sage ni conforme à mes obligations que, chargé de vos âmes, je laisse les bagoulards de Comités électoraux ou les orateurs stipendiés de la radio former vos consciences pour l'accomplissement de vos devoirs civiques. J'en ai le droit et le devoir autant que de diriger vos consciences dans le domaine religieux. Car, entre vos devoirs d'électeurs et vos devoirs de chrétiens, il n'y a pas de cloison étanche, il n'y a pas d'abîmes. Des rapports de très intimes dépendances les rattachent les uns les autres.

En vous disant ces choses, en vous indiquant dans quel sens vous devez voter, je sais à quelles injures je m'expose; je connais ce dont "Ils" sont capables, mais la satisfaction d'accomplir un devoir vaut bien quelques injures: d'ailleurs elles me plaisent mieux que leurs compliments et me sont plus honorables.

Vous savez maintenant comment voter, et vous savez aussi ce que vous devez demander dans vos prières.

Le jour du vote, je demande aux bons chrétiens parmi vous d'assister à la messe et de faire la Sainte Communion.

D'ici là, toute la semaine, ceux qui le peuvent pourquoi ne viendrez-vous pas à la messe et le soir au chant des Litanies et au Salut du S. Sacrement?

À tous je demande d'offrir au Sacré-Coeur vos travaux, vos prières pour obtenir le pardon des péchés qui se commettent pendant les élections et la délivrance de notre patrie.

Une dernière remarque:

Le lendemain du vote, si le même régime doit durer au bénéfice des mêmes cyniques exploiteurs, au détriment de toute la race et de la patrie, je dispense les farceurs ineptes de venir mettre un crêpe à ma porte comme en 1931 où je n'avais même pas pris la peine d'aller voter. Je le mettrai moi-même, et d'autres citoyens honnêtes en garniront aussi leurs portes pour signifier que, dans la Province de Québec, la fierté nationale est morte, que la liberté agonise et que la nation est en deuil.

Prions Dieu que, dans sa miséricorde, il prenne pitié de nous et nous préserve d'une telle calamité.

Daigne la Vierge, Notre-Dame de recouvrance, nous rendre la foi courageuse de nos pères; Notre-Dame des Victoires, nous assurer le triomphe contre les éléments mauvais qui combattent notre vie nationale et religieuse.

Ainsi soit-il."


Le jour du scrutin, les Libéraux de Louis-Alexandre Taschereau (photo) étaient reportés au pouvoir. Le premier ministre répliqua au curé Lavergne. Mais en mai 1936, les audiences du Comité des comptes publics vérifièrent les comptes de l'État et Maurice Duplessis mit à jour des scandales au gouvernement. En juin, Taschereau démissionna et fut remplacé par Adélard Godbout. En août 1936, un scrutin précipité porta au pouvoir l'Union Nationale de Maurice Duplessis.

Michel.
(Un résumé du sermon peut encore être lu en cliquant ici. Merci à la famille Lavergne pour la photo du curé Lavergne.)